A Place at the Royal Table « est un projet de coopération européen, développé par le Réseau des Résidences Royales Européennes dans le cadre de l’Année européenne du patrimoine culturel. En 2018, les châteaux-musées les plus prestigieux d’Europe collaborent pour mieux faire connaître le patrimoine européen et sensibiliser les générations futures à sa valeur et à sa sauvegarde. A Place at The Royal Table cherche à sensibiliser au patrimoine culturel européen, à construire des relations de confiance, à cultiver des liens au-delà des frontières nationales et à créer des ponts entre les cultures. »
Après avoir proposé un « programme culturel commun autour de la table, de l’art de vivre et de la gastronomie dans 15 pays européens », à l’occasion de l’année européenne du patrimoine culturel 2018, l’initiative s’est conclue les 26 et 27 septembre 2019, à la Maison de l’histoire européenne, à Bruxelles, par un europeanshowcase, c’est à dire une présentation.La première journée s’est tenu un colloque avec des participants venant de Pologne, d’Italie, de Belgique, de Monaco, de France. Moi même j’y ai présenté deux communications : la « cuisine en peinture dans l’art européen » et « la Cuisine de tous les pays (1868-1881) d’Urbain Dubois ». La seconde journée était consacrée aux évènements qui se sont déroulés au cours de l’année passée dans les résidences royales européennes. Voici le programme des deux journées.
Ces deux journées furent ponctuées de moments conviviaux avec le verre de l’amitié, de buffets gourmands, et d’une belle soirée à l’Hôtel Métropole, un établissement datant de la Belle Epoque, situé au coeur de Bruxelles.
Patrick Rambourg, 26 septembre 2019, Bruxelles, Maison de l’histoire européenne
Patrick Rambourg, les Universités du goût, le 13-4-2019
Le 13 avril 2019 s’est tenu la 5ème édition des Universités du goût à la Ferme de Gally à Saint-Cyr-l’Ecole. Le thème de cette année était : « La ville et le goût, comprendre les enjeux de l’alimentation en ville ».
Entre conférences, parenthèse littéraire, tables rondes et atelier de dégustation, le public a pu se faire une idée sur le lait des villes et le lait des campagnes, sur les tendances urbaines, les commerces de proximité et les petits producteurs, sur la viande et le végétal, sur ce que l’on mangera en ville demain, etc.
Pour ma part, j’ai présenté une conférence sur « Paris, capitale du goût et de la gastronomie », pour montrer comment la capitale a historiquement influencé le goût. Car « Paris a très tôt été perçu comme une ville des plaisirs gourmands, où s’élabore le bon goût, un goût parisien, qui, longtemps, sera considéré comme l’essence même du goût français »…
« Où est le temps des truffes, des boudins, des volailles, des huîtres? »
Entre le 19 septembre 1870 et le 28 janvier 1871, Paris subit un long siège qui affamera progressivement les Parisiens : la capitale ne succombera pas devant « l’artillerie prussienne » mais cèdera devant la famine, témoigne Arnold Henryot dans Paris pendant le siège (1871). Si les Halles peuvent encore fournir des légumes, des oeufs et des produits laitiers pendant les deux premiers mois, et si le pain paraît satisfaisant jusqu’en novembre, la hausse des prix et la raréfaction des vivres se font vite sentir.
Les viandes de boeuf et de mouton sont rationnées dès la mi-octobre, et celles de cheval, d’âne et de mulet trouvent un temps faveur auprès du public. Mais bientôt, cela ne suffira plus à nourrir les deux millions de Parisiens (environ) ; les chats, les chiens, mais aussi les rats, deviennent dès lors une nourriture pour les bouches affamées. Et l’on pouvait manger à un déjeuner, en novembre, des « émincés de râbles de chat, sauce mayonnaise » et « des côtelettes de chien aux petits pois ».
Les temps sont de plus en plus durs pour l’estomac des parisiens, et les regards se tournent vers les animaux des jardins des plantes et d’acclimatation. L’on commence à voir apparaître dans des boucheries et des restaurants de la capitale des côtelettes de tigre, du jambon d’ours, de la viande de bison, des « pieds d’éléphant à la poulette », etc. Le sacrifice des éléphants stars Castor et Pollux marque les esprits. Mais cela n’empêchera pas quelques privilégiés de consommer cette « cuisine zoologique », comme en témoigne le menu du café Voisin (ci-dessus) du 25 décembre 1870.
Je vous invite également à regarder l’émission« Aux délices du jardin d’Acclimatation », diffusé sur Arte le 18 janvier 2019 et disponible sur www.arte.tv jusqu’au 18 janvier 2021, dans laquelle j’évoque le sacrifice des animaux du jardin d’acclimatation pour quelques gourmets parisiens…
Comment la fourchette s’est-elle imposée sur la table occidentale?
C’est ce que je raconte dans l’émission « Tribu » de Julien Magnolet, diffusée le 4 mars 2019, à 11h00, sur la RTS (radio-télévision suisse) :
« Aujourdʹhui, sur lʹensemble de la planète, on trouve essentiellement trois manières de manger au quotidien : les mains, les baguettes, et les fourchettes. Comment en est-on arrivé à manger avec une fourchette et un couteau dans nos contrées? Alors que beaucoup de gens dans le monde mangent avec les mains, pourquoi est-il considéré comme mal poli de le faire chez nous? On vous parle dʹart de la table en compagnie de lʹhistorien Patrick Rambourg, spécialiste de cuisine et de gastronomie. »
*Un enfant utilisera naturellement ses mains pour manger. D’une façon générale, l’utilisation de la fourchette et des couverts demande du temps et de l’éducation. Pour autant, manger avec les mains, comme cela se fait dans de nombreux pays aujourd’hui, est aussi une pratique culturelle…
*Le restaurant apparaît dans le milieu des années 1760 à Paris.
Il est aujourd’hui rare de pouvoir assister à un exercice de découpe dans un restaurant, le service à l’assiette étant devenu la norme depuis la nouvelle cuisine des années 1970-1980. Toute une gestuelle de table s’est alors perdue.
Pourtant l’art de trancher à longtemps été l’apanage des maîtres d’hôtel, mais pas seulement, car la pratique remonte au moins au Moyen Age, où l’écuyer tranchant procédait à la découpe de la viande royale ou princière lors du service de table ; dont la découpe à la volée qui consistait à trancher « une pièce de viande ou une volaille maintenue en l’air à l’aide d’une fourchette »…
Pour en savoir plus, je vous invite à lire mon article « Profession : écuyer tranchant » dans la revue L’Histoire n° 454 /décembre 2018, p. 18-19.
Comment la cuisine a évolué au fil des siècles pour devenir le reflet de notre identité culturelle ? C’est ce que je raconte dans l’émission de Daniel Fiévet, Le Temps d’un Bivouac / Cuisines d’hier et d’aujourd’hui, sur France Inter le 22 août 2018 à partir de 16h. Une émission à réécouter avec passion.
(Pour précision, au Moyen Age les escargots sont nommés limaçons)
« Si l’Europe médiévale a un goût commun pour les épices et la confection des sauces, il existe dès la fin du moyen-âge des préférences gustatives. C’est ainsi que les Francais mangent leurs carpes moins cuites que les Allemands et qu’ils recherchent la saveur acide dans leurs plats et vins, tandis que les Italiens et les Anglais traduisent une préférence pour le sucré et la douceur. Avec l’arrivée des produits du nouveau monde au 16e siècle, la cuisine évolue et de nouveaux produits comme la dinde ou la pomme de terre font leur apparition dans les recettes. Le goût sucré se répand également… »
« La cuisine est une culture en mouvement. Au fil du temps, une identité culinaire s’affirme bien que la cuisine garde ses bases traditionnelles. Les régions de France acquièrent également leurs spécificités avec des cuisines provençales, bourguignonnes, lyonnaise, etc… Une des recettes les plus anciennes de la cuisine française, ou du moins, les plus codifiées, c’est le civet de lièvre. »
Ma recette du civet d’huîtres :
« Ingrédients
- 32 huîtres, 8 cl d’huile de noix, 65 à 70 g de chapelure, 1/2 litre de vin blanc sec, 1/2 litre d’eau, 10 cl de verjus du Périgord, 5 cl de vinaigre (de vin blanc), 500 g d’oignons, 2 clous de girofle, 1/2 cuillère à café de cannelle en poudre, 1/4 cuillère à café de graine de paradis, 1/4 cuillère de poivre, 4 g de safran (poudre ou filament), sel fin
Réalisation :
- Eplucher, laver, couper vos oignons dans le sens de la longueur et les émincer. Chauffer dans une russe (casserole) moyenne quatre centilitres d’huile, y adjoindre les oignons et laisser compoter à feu moyen et à couvert pendant une demi-heure. Mélanger régulièrement avec une spatule en bois pour éviter que les oignons ne brûlent.
Pendant ce temps, ouvrir les huîtres, les décoquiller et récupérer le jus. Porter l’eau à ébullition et y plonger les huîtres quelques secondes. Les retirer et les réserver; attention ne jeter pas l’eau, y adjoindre le jus des huîtres et passer au chinois étamine. Mixer toutes les épices et la chapelure, ajouter le verjus, le vinaigre et le vin blanc. Mettre le tout dans une russe avec l’eau des huîtres, porter à ébullition et laisser cuire quinze minutes environ jusqu’à épaississement de la sauce. Rectifier l’assaisonnement si nécessaire.
Au moment de servir, chauffer l’huile restante dans une petite poêle et sauter rapidement les huîtres sans les dessécher. Les égoutter sur du papier absorbant et les disposer (huit par personne) avec la sauce dans des assiettes individuelles, servir bien chaud. »
« La cuisine française a marqué de son empreinte les cuisines du monde, et son influence internationale est historiquement avérée depuis au moins le XVIIe siècle. Mais en même temps elle a su emprunter, adapter et assimiler des ingrédients et des savoir-faire étrangers, qui ont pu contribuer à sa propre évolution. Car la cuisine française a toujours été ouverte aux autres cultures culinaires avec lesquelles elle était en contact… »
Tel fut le début de ma conférence sur « la cuisine française entre rayonnement et ouverture » présentée à Nantes le 15 mai 2018 pendant la fête de l’Europe organisée par La Maison de l’Europe et le Centre culturel européen, dont le thème était la gastronomie. Programme Fête de l’Europe 2018, Nantes
Pour les soixante ans de Gaston Lagaffe, et à l’occasion de la sortie du film qui lui est consacré (4 avril 2018), les éditions Dupuis ont publié un hors-série sur Gaston. Le gaffeur qui avait du nez. Nombre de personnalité « racontent comment il avait tout pigé du monde d’aujourd’hui ».
Pour la cuisine, Gaston est en quête du graal culinaire, comme je le raconte dans l’entretien que j’ai accordé à Damien Perez. Loin d’être un OGNI (objet gastronomique non ingérable), et probablement sans en être conscient, Gaston Lagaffe s’inscrit dans une tradition culinaire allant du Moyen Âge à la cuisine moléculaire, avec ses crêpes au beurre de Normandie, ses expériences de nouvelle cuisine et sa « gastronomie industrielle »…. L’interview intégrale à lire ici
« Le Président Emmanuel Macron veut faire entrer la baguette au patrimoine mondial de l’Unesco… Quelles sont les chances de la baguette ? Quand est-elle apparue dans notre histoire de France ? Et qui l’a inventée ? »
Tel était le thème de l’émission La curiosité est un vilain défaut sur RTL (animée par Thomas Hugues et Sidonie Bonnec) à laquelle j’ai participé le 23 janvier 2018. A réécouter avec gourmandise